Contrairement à l’adage : « Ce qui est pris n’est plus à prendre »
Je vous conseille plutôt celui-ci :
« Ce qui est pris sera à rendre »

La régularité : clé de la performance

 Chaque seconde gagnée en début de course devra être rendue au décuple. Partir vite, c’est courir à crédit. Il y a toujours un moment où il faut passer à la caisse et rembourser…
Le “déclin” en fin d’épreuve est le signe d’une course mal gérée. Partir un peu plus vite, en pensant que l’on va se constituer un petit matelas de temps, qui va permettre de se mettre à l’abri en cas de fin de course difficile, revient à se tirer une balle dans le pied. C’est le cas de le dire !
Une course bien gérée doit se construire sur une allure régulière qui va permettre de tenir le rythme jusqu’au bout et même de réaliser un léger negativ-split.
L’inéluctable baisse d’allure n’a rien d’inévitable. C’est juste la mise en lumière d’une gestion inappropriée.
Plutôt que partir 5 à 10 secondes plus vite qui n’auront pour effet que de conduire encore plus vite dans le mur, je conseille plutôt 5 à 10 secondes plus lents en début de course.

Ne soyez pas pressé

Le coureur est un homme pressé. Or, dans cette discipline, ce comportement est totalement inefficace et contreproductif. Les secondes grappillées au début se paient en minutes au moment du décompte final. Lorsque vers le dernier quart de course (le dernier tiers parfois pour les plus imprudents ou les plus impétueux) vous commencez à sentir les effets d’un début de course mal gérée, c’est une fin de course difficile qui se profile. On est alors loin du plaisir qui est recherché lorsqu’on pratique ce sport.
Il n’est pourtant pas si compliqué de réussir sa course. Si l’on observe les résultats des coureurs performants, ceux qui gagnent les courses ou battent des records, le même constat s’impose, c’est l’égalité d’allure qui conduit au succès.
L’analyse de la course du recordman du monde du marathon, Eliud Kipchoge illustre parfaitement cette gestion de course régulière. Il suffit de comparer les temps par tranches de cinq kilomètres pour voir que c’est la régularité qui est la condition de la performance.
Eliud Kipchoge – 2h01’39” (Berlin)

514:2420,832:53
1014:3720,522:55
1514:3720,522:55
2014:1820,982:52
25:14:2820,742:54
3014:2120,912:52
3514:2720,762:53
4014:2020,932:52

Eliud Kipchoge – 1h59’40” (Vienne)

514:1021,182:50
1014:1021,182:50
1514:1421,082:51
2014:1321,102:51
2514:1221,132:50
3014:1221,132:50
3514:1221,132:50
4014:1321,102:51

Avoir compris que la régularité des allures est la clé de la performance est un premier point important mais il ne suffit pas de l’avoir compris et admis pour être en capacité de l’appliquer. Il faut, le jour J, être en mesure de respecter les allures prévues. Cela nécessite un contrôle de sa vitesse de course et une maîtrise des émotions, du stress qui très souvent entraînent le coureur à partir trop vite, dans ce contexte très particulier de la compétition.
Enfin, il faut une dernière chose pour que la régularité soit réalisée le jour J. il faut la travailler afin de la connaître mais aussi et surtout d’améliorer votre rendement à cette allure de compétition.

L’essayer c’est l’adopter

Cette notion de régularité étant admise, le plus difficile reste à accomplir : l’appliquer ! En effet, les pelotons sont bourrés de coureurs pleins de bonnes intentions qui s’envolent en même temps que le coup de pistolet a retenti. Incapables de se contrôler, ils suivent le mouvement et vont pour la plupart droit à leur perte.
Pourtant, dans le peloton des coureurs, il n’est pas rare de faire l’unanimité quand on dit que l’on va partir doucement et réaliser sa course de manière régulière. Mais, au moment du coup de pistolet du starter les bonnes intentions volent en éclats. En effet la quasi-totalité des coureurs partent trop vite. Si l’on est capable de faire abstraction de cet environnement et d’appliquer le plan de course prévu à l’avance, il est possible de réaliser une course équilibrée qui doit vous mener à une performance chronométrique à la hauteur de vos possibilités.

Ne pas s’écouter

Combien de coureurs ont-ils manqué leur objectif en justifiant un départ rapide par un « je me sentais bien » ou « ce qui est pris au début n’est plus à prendre » et encore « j’étais tellement facile … » ? Ces sensations et ces principes stratégiques sont des leurres qui font, à chaque course, des ravages en termes de réalisation d’objectif.
Il est donc indispensable si l’on veut à la fois réaliser la performance escomptée et prendre du plaisir à courir (ce qui va souvent de pair) de respecter son plan de course et surtout d’établir celui-ci avec la plus grande prudence. La caractéristique commune de ces gestions de course c’est un départ en dessous de la moyenne générale de l’épreuve. Cela signifie qu’au cours de la réalisation d’une performance record ou si l’on souhaite réaliser une performance chronométrique, il s’agit non seulement de s’élancer prudemment, mais bel et bien de partir lentement (voire même très lentement) au regard des sensations que l’on peut avoir le jour de l’épreuve.

Connais-toi, toi-même

En fait la plus grande difficulté consiste avant tout à évaluer son niveau du moment et définir un objectif réaliste. Quelle allure envisager pour être à peu près certain de ne pas se surestimer et ne pas partir à des vitesses que l’on ne pourra soutenir pendant la course ?

Toutes les séances sont bonnes à … apprendre

Travailler sa régularité se fait plus précisément lors des séances à allure spécifique. En effet, pour être régulier en course, il faut d’abord et avant tout l’être à l’entrainement.

  • Régulier lors des séances d’efficience (Vitesse spécifique)
    La séance à vitesse de compétition est donc la plus appropriée pour améliorer sa régularité puisque c’en est précisément le but : répéter des séquences à la vitesse de son objectif.
  • Régulier lors des séances de puissance (VMA)
    La régularité est aussi ce que l’on recherche pour réaliser une bonne séance de VMA. En effet, pour solliciter au mieux sa consommation maximale d’oxygène, il faut que les fractions soient réalisées non seulement à des vitesses précises et bien identifiées, d’une part, mais aussi, que chacune d’elles, soient courues systématiquement à la bonne vitesse. Il faut donc les gérer avec régularité. C’est la condition de l’efficacité de l’exercice.
  • Régulier lors des séances d’endurance (EMA)
    Ceci est valable également pour les séances d’endurance aérobie. Pour un travail optimal dans ces intensités entre 80 et 90% de la VMA, il n’y a pas d’autres solutions que de courir régulièrement pour réussir l’entraînement et obtenir les effets escomptés.
  • Régulier lors des séances de footing
    Enfin, même pour un footing, c’est en courant régulièrement que l’on obtiendra les meilleurs résultats et le plus de satisfaction.
    La régularité est donc une des clés de la performance qui se développe au sein de chaque type de séance d’entraînement.

Bruno Heubi

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